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D
écouvrez
la
face
cachée
de
votre
personnalité
Le Lucide
Le Lucide correspond très exactement au rôle que jouent les Français
quand ils s’en vont à l’étranger : bavards, critiques, raffinés, abomi-
nablement grognons ou de politesse exquise selon les moments, ne
pouvant s’empêcher, c’est plus fort qu’eux, de jouer à l’aristocrate
(noblesse oblige), même en dépit de 1789. Les Français sont loin d’être
tous des Don Juan mais l’état d’âme habituel de Don Juan doit res-
sembler assez à celui du Français qui part dans un pays barbare.
2/ La liaison dangereuse
N’oublions pas cependant que Don Juan est également celui qui,
ayant tout défié, se retrouva rejeté par tous et finalement termina
sa carrière assez mal. Nous allons en effet constater que le mythe
de Don Juan s’appuie sur un paradoxe fondamental. Le monsieur
bien fringué de tout à l’heure vous causait en effet bizarrement, en
même temps qu’il vous séduisait, un obscur sentiment de malaise.
Pourquoi ? Peut-être parce que vous le sentiez insaisissable quel-
que part. Peut-être parce que vous ressentiez confusément que
les sentiments que peu à peu vous sentiez monter en vous pour
lui, jamais il ne pourrait les rendre. Peut-être parce que vous avez
toujours su que le séducteur est par définition celui qui se prête
à tout le monde mais ne se donne à personne. Qu’importe ! Vous
découvrez jour après jour derrière le masque un cœur de glace. Il
(ou elle) ne vous aimera jamais puisqu’il (ou elle) n’a jamais aimé
personne. Cette impassibilité profonde est d’autant plus captivante
qu’elle coexiste avec un savoir-faire social extraordinaire.
En tout état de cause, le fait est là : il n’a pas de cœur, ou bien s’il
en a un, ce n’est qu’un cœur de pierre. Pas de sentiments. Pas de
valeurs non plus. Il ne croit à rien, ni au bien, ni au mal, ni à Dieu,
ni au Diable. Tout semblait l’attirer. En fait, secrètement, rien ne
l’intéresse. Pas même lui. Lui-même s’ignore et s’indiffère. Pire qu’un
simple égoïste, c’est un égoïste désintéressé. En d’autres termes,
il est très difficile de motiver profondément le Lucide que vous
connaissez, de le « tenir » par une passion ou par une autre. Derrière
une pensée si claire, si lumineuse, qu’elle fait penser au plein jour
de juin, il y a en fait la nuit polaire. C’est ainsi que l’extraordinaire