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D
écouvrez
la
face
cachée
de
votre
personnalité
Le Lucide
De même que le Lucide est un homme dangereux à cause de sa
lucidité même, de son incapacité quasi-constitutionnelle à ne perdre
jamais le nord, il semble être attiré magnétiquement par le danger,
par les défauts de toutes sortes, comme si son fantasme secret était
précisément de s’étourdir de l’émotion qu’il est incapable d’éprou-
ver. Le « mécanisme moteur » du Lucide est très précisément la
contradiction fondamentale qu’il y a entre, d’une part la disponibi-
lité, l’efficience, le goût de l’action pour elle-même et d’autre part
l’impassibilité profonde, le manque d’intérêt réel pour quoi que ce
soit. La motivation pour la tâche est effective beaucoup plus qu’af-
fective. C’est pour cela même que la vie est un jeu. Grimper à l’arbre
pour décrocher la pomme est bien plus rigolo que mordre ensuite
dedans. Gratuité. Nous sommes dans un univers carton-pâte où
rien ne compte mais où on cherche à s’oublier. Jeu d’échecs. Tout
ce fatras multicolore n’aurait-il pas pour but inavoué de faire jouer
la seule raison d’être authentique du Lucide : sa lucidité même ?
4/ La science sans la conscience
L’intelligence est vécue comme la finalité. Le Lucide est viscéra-
lement un passionné de science et plus précisément de science
expérimentale. Le but ne sera pas forcément de faire ressortir des
lois mais de comprendre simplement le comment singulier et le
pourquoi original de chacun des cas particuliers qu’il rencontre
en chemin, quitte à infirmer ces mêmes lois. C’est l’intelligence au
service de l’exception. Peut-être est-ce pour cela que le Lucide que
vous connaissez déteste autant la foule ? La foule est généralisante
et bête, c’est pourquoi il préfère les petits comités où il peut exercer
son remarquable esprit critique. Dans certains cas, le Lucide peut
même éprouver un sentiment, qui est à l’amour, ce que l’aspartamest
au sucre, une espèce de complicité intellectuelle fondée sur l’estime
réciproque. Voltaire et Madame du Châtelet, les deux compères
des Liaisons dangereuses. « L’Amour n’est que l’échange de deux
fantaisies et le contact de deux épidermes », écrit Chamfort.
Le XVII
e
siècle était le siècle de Louis XIV et des Passionnés ; le
XVIII
e
siècle est celui de Voltaire et des Lucides. Une gigantesque