la vie présente en ignorant ce que nous sommes.
        
        
          Il y a trois manières d’ignorer ce que nous sommes :
        
        
          — On peut se méprendre complètement sur ses «
        
        
          
            capa-
          
        
        
          
            cités
          
        
        
          », par excès ou par défaut, problème classique de la
        
        
          confusion entre le vouloir-être et le pouvoir-être.
        
        
          — On peut ignorer superbement son «
        
        
          
            caractère
          
        
        
          », ses
        
        
          limites et ses possibilités génétiques, ses besoins profonds
        
        
          et ses inquiétudes congénitales. Ceci est d’ailleurs le pos-
        
        
          tulat de base de toute la psychologie du XX
        
        
          e
        
        
          siècle. Parti
        
        
          de là, on oriente mal ses dispositions et l’échec de notre
        
        
          vie se trouve inscrit dès son point de départ.
        
        
          — On peut enfin méconnaître complètement la «
        
        
          
            ryth-
          
        
        
          
            mique
          
        
        
          » inhérente au vivant et projeter sur notre conduite
        
        
          (au travail tout au moins) des modèles linéaires importés
        
        
          des usines ou des bureaucraties.
        
        
          Nous sommes ici dans une logique du «
        
        
          
            fractal
          
        
        
          » où une
        
        
          quantité innombrable d’échelles différentes se super-
        
        
          posent. Le rythme du battement de cœur (de l’ordre de la
        
        
          seconde) se trouve sans doute au centre d’un système
        
        
          ayant pour limite, vers le haut, la durée de la vie toute
        
        
          entière (qui accomplit un cycle, avec une apogée vers
        
        
          40 ans) et pour limite, vers le bas, des périodicités molé-
        
        
          culaires ou atomiques mal connues, de l’ordre sans doute
        
        
          de la nanoseconde.
        
        
          Deux exemples parlent avec éloquence.
        
        
          Tout le monde sait que le sommeil est structuré par des
        
        
          périodes de 90 minutes (ce qui correspond à peu près au
        
        
          cycle complet d’une machine à laver). Chacune de ces
        
        
          périodes s’achève ainsi par une phase de REM («
        
        
          
            rapid
          
        
        
          
            eyes movements
          
        
        
          ») qui dure une dizaine de minutes et au
        
        
          cours de laquelle on rêve (la machine à laver, elle, ne rêve
        
        
          pas, elle essore le linge).
        
        
          Ce qu’on sait peut-être moins, c’est que ces cycles
        
        
          se prolongent tout au long de la journée. Toutes nos
        
        
          et d’en faire perdre aux autres
        
        
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