L'art de se faire des ennemis - page 180

contrainte d’un monde à la fois plus ouvert et plus
intégré, avec l’explosion des communications, des
transports et des échanges internationaux aboutit dans
un premier temps à la nécessité d’une éthique radicale-
ment différente des éthiques plus ou moins tribales du
passé — au XX
e
siècle, le « Nationalisme » — que je pro-
pose d’appeler l’ « Humanisme Intégrationniste ». Aux
antipodes de l’ « Individualisme Social » de la civilisation
industrielle qui propose à l’individu d’abord d’accomplir
à la façon d’une comète sa trajectoire individuelle et
ensuite de se donner bonne conscience en faisant un peu
la charité, l’Humanisme Intégrationniste propose d’em-
blée comme objectif l’intégration historique de la planète
et l’accomplissement de l’équation :
Je
= Tu (Allocentrisme concret)
= Tous (Humanisme)
= Tout (Écologie)
Mais en pratique cet objectif n’est réaliste que s’il est équi-
libré, comme l’Actif et le Passif dans un bilan, par une
propension tout aussi forte à la concentration et
à l’autonomie. Ce second mouvement correspond à la
tendance des sociétés interactives à l’ «
atomisation
», à la
différenciation croissante de chacun de leurs membres.
Le monde d’hier, à la manière d’un tas de cailloux, était
constitué d’une multitude d’individus semblables,
interchangeables, juxtaposés, fellahs égyptiens, coolies
chinois ou « Misérables » en France, tous anonymes. Le
monde de demain, à la manière d’un organisme humain,
sera constitué d’un système organisé, ou chaque individu
sera spécialisé, à la manière d’une cellule, dans une fonc-
tion précise dont dépendent toutes les autres cellules.
À un univers de liens irrévocables et rares succède donc
un univers de liens nombreux, de multi-appartenance,
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