Dictionnaire des mots en voie de disparition - page 122

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D
ictionnaire
des mots
en
voie
de
disparition
de base comme le marchandage du prix d’un sari sur un marché des
­Indes ou la recherche, par un routard, de la dernière chambre disponible à
Ushuaia. Favorisé par la puissance économique de l’Angleterre au xix
e
siècle et de l’Amérique au xx
e
, le
globish
s’impose également par sa
concision remarquable, son extrême modularité qui lui permet de créer
facilement des agrégats de concepts :
boy-friend, fish & chips, bed &
breakfast.
Le
globish
n’est peut-être pas la langue la plus facile du monde à acquérir.
L’espéranto, l’indonésien ou l’espagnol lui sont peut-être supérieures de
ce point de vue en raison de leur phonétisme transparent. Le gros défaut
du globish est en effet que, comme le français, il s’écrit d’une façon et se
prononce d’une autre. Il est bien difficile de prédire
a priori
que
to like
se prononce « tou laille-ke » tandis que
to live
doit se prononcer « tou
li-veu ». D’autres mots comme
enough
ou
temperature
sont une torture
pour un dentier nippon, une malédiction pour un bachelier ­français. Il
n’est donc pas interdit de supposer que pour conserver son statut de
langue universelle, le globish devra faire quelques concessions en se
faisant un peu plus phonétique et par conséquent vocalique. Qui sait :
avec un peu chance
english
deviendra « an-gue-lich » pour le plus grand
bonheur et le plus grand repos des mâchoires internationales (nippones
en particulier).
D’autres langues sont à l’inverse plus rigoureuses. En terme d’efficacité
technique et de précision drastique, rien n’égale l’allemand qui ­différencie
très subtilement le
hinausobenfahren
(« rouler dans un véhicule en
remontant une pente et en s’éloignant du locuteur »), le
herausgehen
(« marcher à pied en se rapprochant progressivement du ­narrateur ») :
on est vraiment très loin du misérable « aller » français ou du « to go »
anglais.
Le globish, s’il n’est ni la plus précise ni la plus facile des langues, reste
cependant un dialecte international acceptable, d’autant qu’avec la mon-
dialisation, la langue a fait d’énormes progrès dans les écoles. Au début
du xxi
e
 siècle, la moitié des Terriens baragouinent peu ou prou le globish.
Le globish est aujourd’hui ce que furent jadis le grec sur les rivages de la
Méditerranée, le latin dans les universités d’Europe, le français à la cour
des despotes éclairés.
À quoi cela peut-il bien servir, pour un jeune Français, d’apprendre encore
les fastidieuses déclinaisons allemandes ou pour un jeune Américain de
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