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D
ictionnaire
des mots
en
voie
de
disparition
Le temps est donc venu pour vous de dénoncer le plus grand tabou de
notre temps et de remettre tout simplement en cause le droit « naturel »
de chaque être humain à se reproduire sans limite. Lorsque le canot de
sauvetage est plein et que la survie de tous est menacée, il faut avoir le
courage, sinon de jeter certains par-dessus bord, au moins de décourager
la reproduction à l’intérieur de la barque.
Les solutions ne manquent pas. Il y a bien sûr la contraception gratuite, à
commencer par le préservatif, mais il y a aussi la suppression progressive
des allocations familiales, voire une augmentation de l’impôt sur le revenu
en fonction du nombre d’enfants (alors que c’est justement l’inverse qui
souvent se pratique aujourd’hui). Dans un monde idéal, la perspective
globale pourrait être inversée : la non-reproduction devient la norme
culturelle, sauf si des pré-requis sont assurés, comme l’éducation, la
nutrition ou la santé future des enfants. Pas d’enfant sans dotation
d’assurance-vie au préalable.
L’outil technique le plus efficace réside peut-être dans l’implant contra-
ceptif. Ce bâtonnet fin d’environ 4 cm de long sur 2 mm de diamètre
est implanté dans la partie interne du bras de la patiente (ou du patient
peut-être un jour). Cet acte chirurgical est actif au bout de 24 heures. Sa
durée actuelle est au maximum de 3 ans, mais elle pourrait être prolon-
gée dans l’avenir. Il est de toute façon possible de le remplacer ou de le
retirer avant cette échéance et le cycle hormonal reprend alors son cours
naturel en quelques semaines. Pendant l’implantation, une hormone
nommée étonogestrel bloque l’ovulation et protège contre l’oubli de la
pilule ou les difficultés d’approvisionnement régulier.
Une politique contraceptive mondiale pourrait ainsi être couplée à une
politique mondiale de lutte contre l’illettrisme (quand le niveau d’édu-
cation des femmes s’élève, la population décroît mécaniquement). Pour
que cela aboutisse, il faudrait une organisation mondiale associée à un
fonds mondial de stabilisation démographique. Ce fonds pourrait être
alimenté par un impôt au second degré financé par chacun des États.
Sa collecte se ferait donc au niveau national ou local tandis que le contrôle
de sa redistribution se ferait au niveau international, ce qui suppose, une
fois encore, un embryon de gouvernance universelle.
La plupart des contrariétés actuelles de notre espèce ne viennent-elles
pas des frontières politiques, complètement dépassées, qui ne sont plus
du tout en phase avec le nouveau paradigme naturel et culturel ?