L'art de perdre son temps - page 79

présomptions pour que six mois plus tard, mon enthou-
siasme pour le russe soit tombé au profit d’autre chose.
Un véritable «
contrôle de gestion de soi
» peut être alors
mis en place, une comptabilité analytique rigoureuse
de tous les projets engagés. En face de chaque projet,
deux chiffres : ce qu’il rapporte et ce qu’il coûte. On raye
ensuite tous les projets déficitaires. Puis on les élimine
impitoyablement.
Voilà ce qui s’appelle une vie humaine bien gérée.
Il y a bien sûr l’ambiguïté des charges qui sont également
des ressources (comme un enfant), des ressources qui
sont aussi des charges (comme un emploi), des charges
qu’on ne peut pas matériellement éliminer (comme ses
enfants ou ses parents), sans compter l’extrême difficulté
de quantifier tout ce qui touche au vivant (« Combien me
coûte et me rapporte cette relation amoureuse ? »).
Faute de pouvoir appliquer de tels préceptes à la lettre,
on peut se consoler en essayant d’en appliquer l’esprit et
en éliminant impitoyablement de son existence tout ce
qui est inutile et tout ce qui coûte manifestement trop
cher : relations encombrantes, automobiles en double,
gazon à l’entretien exigeant, polygamie coûteuse, etc.
Tout ce qui ne sert à rien doit être éliminé.
Tout ce qui coûte cher doit être remis en cause.
À moins que vous ne souhaitiez faire de votre vie un
échec.
Dans lequel cas, il faut bien sûr accumuler les
charges fixes de cette entreprise qui est votre vie
personnelle.
et d’en faire perdre aux autres
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