L’art de s’accrocher à ce qui n’existe plus et de disparaître avec
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raîcheur
Quoi de plus agréable qu’une brise fraîche au bord de l’eau après une
journée de canicule ? Pourtant, à l’aune du changement climatique, cette
brise fraîche pourrait bien devenir un luxe inaccessible à beaucoup. Et les
choses ne sont pas près de s’arranger. Il faut s’attendre à un emballement
prochain qui va donner au réchauffement des allures exponentielles. Le
moteur principal, celui de l’accroissement du CO2 dans l’atmosphère,
va en effet prochainement activer 3 moteurs secondaires, aujourd’hui
encore éteints, qui vont brutalement accélérer les choses :
1/ La fonte des glaciers et des banquises, principalement au Groenland
et au pôle Nord, baisse l’effet miroir de la Terre, ce qu’on appelle
l’albédo, le réfléchissement-rejet de la lumière solaire dans l’espace.
2/ La fonte des sols gelés du permafrost de Sibérie ou du Grand Nord
canadien libère dans l’atmosphère des nuages de méthane dont l’effet de
serre est 22 000 fois supérieur à celui du CO2.
3/ L’augmentation de la teneur de l’atmosphère en vapeur d’eau,
consécutive aux deux mécanismes précédents, contribue à son tour à
augmenter l’effet de serre qui augmente à son tour les températures.
Parallèlement, 3 systèmes de régulation naturels vont cesser de jouer
leur rôle :
1/ La forêt mondiale rétrécit chaque année au profit, par exemple, de
champs de soja (au Brésil), de plantations de palme pour faire de l’huile
(à Bornéo), du trafic de Coltan (en Afrique centrale) ou de constructions
urbaines (partout dans le monde).
2/ La capacité de l’océan à absorber les surplus de CO2 contenus dans
l’air est proche de la saturation. Une fois que l’eau d’Évian (plate) aura
été transformée en eau de Badoit (avec des bulles) et que les océans
ressembleront à des bouteilles d’Orangina, il n’y aura plus grand-chose à
espérer de ce côté-là.
3/ On ne peut pas en demander toujours plus au plancton comme à
n’importe quel contribuable français. Aujourd’hui il est proche de l’indi-
gestion. Il ne parvient plus à jouer son rôle traditionnel de convertisseur
du CO2 gazeux de l’air en molécules solides de calcaires cristallisées sous
forme de mini coquillages. Après le réveillon, on a besoin de jeûner. C’est
une question d’hygiène et d’équilibre, même si le ramadan du plancton
n’est pas pour notre espèce du meilleur augure.