fait éclater la famille nucléaire. Les familles monoparen-
tales et les « recompositions » (un homme + une femme
+ les enfants de leurs premiers lits respectifs)
se font de plus en plus nombreuses. Un même individu
se réfère alors à deux ou trois familles différentes (la nou-
velle famille de son père + la nouvelle famille de sa mère
+ la famille de sa petite amie, par exemple). On peut
parler peut-être de «
famille polycentrée
».
La civilisation interactive sera celle de l’individu seul,
celle de la solitude compensée par le village planétaire.
Tout le monde interagit avec tout le monde, à la manière
d’un vaste cerveau, où chaque neurone communique
avec chacun des autres, mais en même temps l’atome
social de base est réduit à sa dimension la plus petite :
celle de l’individu seul. Certes Internet procure une
infinité d’affinités aux quatre coins du monde. On a aussi
un père biologique au Brésil, une mère au Japon. On a
encore une ex-rencontre de vacances en Australie qui
nous envoie chaque année ses vœux, des collègues en
Écosse, une amie d’enfance au Zimbabwe et un copain
de fac dans notre ville (on ne le voit jamais, le temps
de transport est trop long). Tout ce petit monde commu-
nique régulièrement par messagerie électronique. On
peut parler de «
famille excentrée
».
Tout cela n’empêche pas Gustave, en ce soir de Noël de
2081, de se retrouver seul au fond de son stimulateur
sphérique, tandis que Charlotte tricote, seule aussi,
devant l’écran mural où une émission est animée par
Clovis Martin (l’arrière-petit-fils de Jacques). Ces «
déçus
de la civilisation médiatique
», après bien des aléas, ont
décidé de finir leurs jours ensemble (ou presque), comme
ils les avaient commencés.
En résumé, si vous voulez sauvegarder votre équilibre en
ces temps tumultueux :
L’art de se faire des ennemis
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