par son appartenance à des «
réseaux
» relationnels où
tout le monde se connaît et où l’information circule en
abondance. Il y a les annuaires des grandes écoles par
exemple qui noyautent des réseaux puissants. Il y a les
fichiers d’entreprises ou de particuliers. Il y a surtout
le fichier clients, fournisseurs ou prospects de chaque
entreprise. Il n’est pas une organisation qui ne compile et
n’exploite aujourd’hui son propre petit fichier ou son
petit réseau de relations.
Le pouvoir aujourd’hui est aux mains de ceux qui appar-
tiennent à des réseaux influents et qui maîtrisent parfai-
tement le langage de la médiatisation, c’est-à-dire celui
des apparences.
Je propose d’appeler «
sociocrate
» ce type d’individu.
La brève dynastie des sociocrates s’intercale entre celle des
industriels et celle des experts. Alors que l’expert devra
refaire continuellement la preuve de son excellence, et
que le capitaliste devait, pour survivre, prendre des
risques aussi énormes que ses investissements, le socio-
crate n’a bien souvent qu’à se donner le mal de passer un
concours. Comme les Mandarins chinois, il peut alors
s’endormir tranquillement : le système veille sur lui.
Il figure en bonne place dans un annuaire de grande
école ou sur une liste archivée dans le sous-sol d’un
rectorat. L’avenir lui appartient donc. Les commandes
affluent toutes seules. Et s’il en vient un jour à commettre
une faute énorme (comme cela arrive parfois à certains
hauts responsables), il n’a pas trop de souci à se faire.
Il perdra peut-être bien son poste, pour le principe, mais
il est assuré d’en obtenir rapidement un autre presque
aussi bien. Il n’aura même pas à se démener. On viendra
le lui apporter sur un plat. Entre cousins, on ne peut rien
se refuser !
Les sociocrates à terme sont condamnés. Ils seront ana-
chronisés quand les réseaux ne serviront plus à rien
L’art de perdre son temps
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