D'une part, sur le plan de l'avoir, on traite les jeunes
Français, petits ou grands, en enfants gâtés. Est-ce ici
la revanche de la génération précédente, éprouvée par
la guerre ? Est-ce l’effet de l’explosion des familles
désunies, où chacun des parents essaie de se faire
absoudre aux yeux de l’enfant par des cadeaux, de
l’argent, des friandises, des marchandises. Sur le plan
de l’avoir, des objets, des jouets, des vêtements, des ali-
ments, le petit Français ne manque de rien. Il voit souvent
la réalisation de ses moindres caprices. Il s’habitue à la
facilité.
Mais en même temps, sur le plan de l’Être, on pratique,
sans bien toujours d’ailleurs s’en rendre compte, une
sorte de castration morale. Les parents de 30 ou de 40 ans,
stressés par l’accumulation des charges et des besoins
artificiels, dévalorisent souvent leurs enfants par des
reproches ou des interdictions. Ils les incitent plus
souvent — disons le mot —
à ne pas faire
qu’à faire.
Souvent, à la maison, on râle. Les parents se disputent,
le chien aboie, l’enfant crie. Peut-être tout simplement
pour perpétuer une culture à la française, apprise dès le
berceau au pays des Gaulois, des cathares et des sans-
culottes et que l’on reproduit plus tard sans même s’en
rendre compte. Les Français aiment se faire du mal,
autant au sens réfléchi qu’au sens réciproque. Les choses
ne s’arrangent guère dans les écoles de France où la mise
en compétition, la sanction et le reproche humiliant en
public sont toujours employés en guise de méthode
pédagogique.
Castré dans son être, pourri dans son avoir, le petit
Français devient souvent, à l’âge adulte, un assisté reven-
dicatif. Non seulement il n’a pas l’habitude de se
débrouiller ou de prendre des risques pour obtenir ce
qu’il souhaite, mais par ailleurs il reste cloué au sol par
son complexe d’infériorité. Et au lieu de se positionner,
comme l’économie nouvelle le souhaiterait, en créateur
L’art de démotiver ses collaborateurs
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